
«La Sainte vierge m’apparaît après chaque journée de travail»
Pierre Diop, 54 ans, marié et père d'une petite famille, est à l'heure actuelle l'un des rares féticheurs sérères à qui s'adressent les dieux et les djinns. Il lui aura fallu attendre la mort du président poète Léopold Sédar Senghor pour avoir la bénédiction des ancêtres et l'autorisation d'exercer ses dons et son pouvoir. Sa réputation dépasse aujourd'hui les frontières de la communauté rurale de Fandène à Thiès où, chaque jour sauf le vendredi, les gens viennent de tous les coins du pays et même de l'étranger pour le consulter. Il reçoit en moyenne jusqu'à 30 personnes par jour, des consultants parmi lesquelles des marabouts, des hommes politiques, des comédiens, des anonymes. Notre équipe a été jusqu'à Fandène pour faire un reportage sur cet homme qui, au cours de l'entretien qu'il nous a accordé, a fait des révélations et pas les moindres.
Pierre Diop, comment vous sont venus vos dons de féticheur pour prédire l'avenir et depuis quand exercez-vous ce métier de guérissent et de devin ?
C'est dans la nuit où est mort le Président Léopold Sédar Senghor que les ancêtres, par le biais de mon arrière grand-père paternel, Cor Thioro Diop, me sont apparus pour me donner les pouvoirs et en même temps pour m'accorder le droit de faire usage de mes dons de divin. Car, chez les Sérères, pour qu'un savant ou devin soit intronisé, il faut attendre la mort du dernier élu. Et, depuis cette nuit, c'est eux qui me dictent tout ce que je dois faire. C'est en grande partie mes ancêtres sérères, certes, mais aussi Serigne Touba, Serigne Fallou et la Sainte Vierge me sont aussi apparus et chacun m'a donné des secrets pour que je puisse soigner et guérir des personnes. Ils viennent souvent me révéler des sacrifices pour mes patients et les gens qui viennent me voir. Jusqu'à ce jour, après chaque journée de travail, la Sainte Vierge m'apparaît sur le haut de l'arbre qui est dans la cour pour contrôler ce que je fais et dis aux gens. Ainsi je reçois même des marabouts Mbacké-Mbacké et des Chérifs. Au début, je recevais jusqu'à 60 personnes par jour, mais, par la suite, je suis tombé malade et maintenant je ne reçois que 30 ou 25 personnes.
A l'instar des autres marabouts et féticheurs, vous dites en savoir sur le futur du Sénégal. Qu'est-ce vos ancêtres vous ont révélé à propos de la succession du président Abdoulaye Wade, par exemple ?
Je veux juste que Karim Wade me dise clairement quelles sont ses ambitions en ce qui concerne ce pays. J'entends parler de la Génération du concret mais Karim reste flou dans ce qu'il veut. Je veux qu'il me dise si oui ou non il veut être élu président. Et je saurai quoi faire à ce moment-là. Beaucoup de marabouts, juste pour se faire de l'argent ou pour se faire connaître, sont allés vers les journalistes faire des déclarations sur le prochain président, mais je peux vous dire que peu de gens sont informés sur la succession de Abdoulaye Wade et pour ce qui est de Karim Wade, rien n'est encore acquis ni perdu. Les ancêtres sont venus me confier les offrandes et sacrifices à faire, mais je n’ai pas encore l’autorisation de le dire.
Qu'est-ce qu'on vous a révélé au sujet de Karim Wade ou alors est-ce que vous n'abondez pas dans le même sens que ces marabouts dont vous parlez ? Ne voulez-vous pas simplement avoir une audience avec Karim Wade ?
Non. Au temps de feu Boubacar Sall, j'ai cheminé avec Maître Abdoulaye Wade, son père, j'ai beaucoup fait pour lui et ce n'est pas pour autant que je suis allé le solliciter pour avoir quoi que ce soit depuis qu'il est président de la République. Quant à Karim Wade, nous sommes liés par quelque chose que je ne peux expliquer. Je n'ai pas peur de qui a été engendré, d'aucun être humain. Et si je décide de lui prêter main-forte, je ne vois pas dans cette aire géographique la personne capable de m'en empêcher. Je ne demande pas un sou à Karim Wade, car je gagne bien ma vie grâce aux nombreuses consultations et travaux que je fais pour des personnes à travers le Sénégal et l'Europe. Je veux juste qu'il me dise s'il veut être élu président. Et c'est seulement à ce moment que je saurai quoi faire.
Entretien réalisé par Rokhaya THIAM
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