vendredi 24 novembre 2017

La condition noire, entre apitoiement et indignation saisonnière

Il a suffit d’un reportage télévisé de chaîne américaine CNN pour que les africains du sud du Sahara prennent, enfin, conscience du commerce dont leurs ressortissants font l’objet. Or, que n’a-t-on pas fait semblant d’ignorer une situation désastreuse que subissent les noirs dans la partie septentrionale du continent africain ? 
Par D.

Du Maroc en Égypte, Mauritanie comprise, y être noir, c'est s’exposer à tous les abus et mauvais traitements impunément. Dans ce périmètre, se confine une hiérarchie raciale fondée sur la pigmentation cutanée. Les individus savent à quoi s’attendre et ce qu’ils peuvent se permettre, selon que leur taux de mélanine est fort ou faible.
Cette conviction est gravée dans le marbre de la croyance collective et, par extension déviationniste des textes sacrés, le rapport au culte, dans ces sociétés arabo-berbères. Être noir, c'est s’y exposer à tous les modes d’avilissement. Dans ces contrées, le code noir napoléonien passe pour un humanisme avant-gardiste, tellement la négation du nègre a un accent prohibitif. Et ce, depuis la nuit des temps. La société arabo-berbère ne s’en est jamais cachée et les nègres ne l’ont jamais ignoré. En fait, il s’est toujours agi d’un consensus caractérisé par la virilité surfaite des arabo-berbères et par la propension à l’autruche des nègres, dociles et soumis à cette fatalité que rien ne justifie.
Longtemps que les maures en Mauritanie ou encore les Touaregs au Niger et dans la zone sahelo-saheliene s’adonnent à une telle pratique, sans que les organisations communautaires sous régionales, régionales et continentales ne pipent mot. Dès lors, il devient somme toute risible à voir cette poussée fiévreuse soudaine, qui a tout d’un réveil post comateux. Or, qui oserait dire que cette situation ne fût fatidique et préfigurée dans les entournures du projet de l’union pour la méditerranée, chère à Sarkozy en 2007.

Pour rappel, le président français d’alors rêvait en grand, dans son insatiable appétit de grandeur de la trempe napoléonienne. Tenant compte de ses désavantages comparatifs de l’élargissement européens, au profit de l'Allemagne, notamment avec l’intégration des pays de l’Europe de l’est, cette union allait permettre à la France et à T délocalisation à la fois des unités de production à faible intensité capitalistique et les centres de rétention des candidats à l’immigration clandestine.
C’est ainsi que la fête du 14 juillet de 2007, les champs Élysées et la place de la concorde fussent une kermesse de démocrates et dictateurs de tous poils répartis entre les deux rives de la méditerranée. À l’exception de la chancelière germanique, Angela Merkel, venue assurer ses gardes, car ne voyant pas ce projet d’un bon œil, tous les chefs de gouvernement ou d’Etat présents à ce sommet furent, soit de l’Europe méridionale, soit du moyen Orient, soit du Maghreb.
Au final, ce projet sera mort né, eu égard à ses desseins sionistes, qui n’agréait ni la Syrie, ni l’Algérie. En vérité, derrière les intérêts commerciaux, auxquels l’Europe pourrait aspirer, se cachait une alliance tacite qui rendait les Etats membres solidaires à l’Etat d’ Israël.
Le seul projet qui a été mené à terme demeure le renforcement du Frontex (la protection des frontières extérieures de l’Europe) pour lequel la Libye de kadhafi reçut quitus d’endiguer, par tous les moyens, l’immigration clandestine. Il était question de délocalisation des centres de rétention sur le corridor sud de méditerranée du Maroc à la Libye.
La suite nous la voyons s’opérer sous nos yeux, avec une impuissance pusillanime des dirigeants africains.
D’abord en laissant les dirigeants du Maghreb s’engager dans ce projet, pour lequel un rôle de gardes chiourmes leur était prédestiné contre les populations sud du Sahara. La posture méfiante et scrutatrice de Merkel vis-à-vis de Sarkozy était attendu des dirigeants de l'Afrique subsaharienne vis-à-vis de leurs collègues arabes. Malheureusement, Kadhafi les tenait tous par le cordon de la bourse, en tant que principal bailleur de l’UA, mais aussi, pour certains comme le Mali, comme premier investisseur étranger.
Dès lors, rien d’étonnant qu’après cinq ans que le guide libyen a été tué, dans la foulée du printemps arabe, moins pour des raisons humanitaires, que pour des soubassements économiques. Grâce, entre autre, à une propagande du mainstream médiatique, CNN en tête, tiens !
Ceux là mêmes qui, hier, ont anesthésié les africains contre toute capacité à s’indigner devant le crime commis contre le peuple libyen, se seraient ils découvert une conscience empathique vis-à-vis des nègres, vendus aux enchères ?
En tout état de cause, cette situation dénote d’une absence totale de leadership africain. Et malgré, la diversification des sources, l’information reste encore le parent pauvre du réveil des consciences. Malgré la pléthore de groupes de média, les principaux canaux crédibles aux yeux de l’opinion demeurent les médias occidentaux. Or, eux comme les politiques sont parties intégrantes de l’idéologie dominante, tandis que les médias africains excellent dans le folklore et le divertissement.
À titre d’exemple, le groupe GFM du Sénégal a été capable de mobiliser plus de deux cent personnes, rien que pour la couverture d’un concert de Youssou Ndour et, dans le même temps, illustrer en images la revue du monde avec des montages des chaînes occidentales.

Mais enfin, il y’aura toujours des images qui nous feront déplaisir à nous sentir mal aimés du reste, et toujours des artistes à nous dérider de leurs funestes inventions musicales, voire dansantes. Ainsi va l’Afrique, entre le rire et le pleurs, pas assez de temps pour l’altérité respectable. 

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